Ca sent le roussi pour le conclave des retraites ! C’est le moins que l’on puisse dire après le départ successif et tonitruant de plusieurs organisations syndicales, celles qui défendent la cause des ouvriers et des salariés, cette semaine, qui ont préféré claquer la porte des négociations plutôt que de se complaire à jouer à faire semblant dans ce qui ressemble de plus en plus à une mascarade digne d’une comédie à l’italienne !
Seules restent encore à bord de ce bateau, frêle esquif qui s’apparente au radeau de la Méduse prenant l’eau de toute part, la CPME, le MEDEF, la CFE-CGC et la CFDT. Mais pour combien de temps avant de flirter avec le naufrage ?
Pourtant, tout avait bien commencé courant janvier quand le Premier ministre François BAYROU avait donné son aval pour organiser cette grande concertation participative et ouverte, « sans tabou » avait-il alors précisé, réunissant tous les acteurs du patronat et du salariat autour d’une même table afin de remodeler ou pas la fameuse réforme des retraites (véritable serpent de mer de la vie sociétale de l’Hexagone depuis des lustres !) que la précédente occupante de Matignon, l’insubmersible Elisabeth BORNE, avait passé en force, sans aucune empathie et sans tenir compte de l’avis d’une majorité de Français à grands coups de 49.3 ravageurs !
Bonjour l’esprit démocratique puisque les élus de l’Assemblée nationale n’avaient pu s’exprimer correctement sur le sujet en le votant.
Retour à la case départ sans toucher les vingt mille !
Il aura fallu une petite phrase du maire de Pau il y a quelques jours, prononcée à la suite d’une prise de décision catégorique pour que le travail entamé collectivement depuis plusieurs semaines lors de ce conclave – rien n’avoir avec la papauté en effet ! – vole plus ou moins en éclats. La décision irrévocable du Premier ministre de ne pas revenir sur l’âge de la retraite à 62 ans, alors que les discussions semblaient ouvertes autour de ce sujet, véritable point d’achoppement entre une très large majorité de nos concitoyens, l’ensemble des syndicats de salariés et la vision de la gouvernance étatique.
Une volte-face pour le moins inattendue et décidée sans en avoir concerté les participants dudit conclave qui fera dire par ailleurs au secrétaire général du Parti Socialiste Olivier FAURE remonté comme un coucou suisse face aux médias que « quand on ne respectait pas ses engagements, on ne méritait pas de rester Premier ministre… ». Et toc !
Retour donc à la case départ, sans avoir au préalable encaisser les vingt mille euros de bonus comme dans un célèbre jeu à la vocation immobilière, pour le gouvernement qui se voit à nouveau menacé d’une motion de censure de la part de l’ensemble des représentants politiques de la gauche. Sans omettre que les syndicats ayant plié bagages durant ce conclave se préparent à retrouver en nombre les rues de France et de Navarre – c’est le retour du printemps et de son lot de cortèges revendicateurs que les Français connaissent bien ! -, et de provoquer une nouvelle fois une période d’incertitude dont on se serait volontiers passé ; tant au niveau économique où bon nombre de secteurs broient du noir avec la série de liquidations d’entreprises et de suppressions d’emplois à répétition (c’est le cas notamment du secteur textile et vestimentaire à l’heure actuelle) que stratégique puisque désormais nous entrons de plain-pied et plus personne ne s’en cache dans la période des préparatifs à des jours encore plus sombres qu’ils ne sont déjà, en raisonnant pour l’« économie de guerre » mobilisatrice face aux velléités impérialistes de l’ogre russe.
Et pourquoi pas la retraite à 70 ans ?!
D’ailleurs, c’est précisément ce contexte international très incertain qui aura fait bouger irrémédiablement les lignes du Premier ministre, en rejetant tout de go le retour de l’âge de la retraite à 62 ans, avant même que le conclave n’ait enfin produit sa fumée blanche, synonyme de verdict divin et définitif !
Motivation de l’intéressé : il sera nécessaire aux Français de travailler davantage afin de financer la nouvelle politique de défense et de réarmement – on part de très loin selon les experts militaires – pour faire face aux enjeux géostratégiques de demain. Certains parlementaires ont même esquissé dans leurs préconisations les plus folles que le départ à la retraite pouvait être reporter carrément à l’âge de…70 ans !
En attendant, le conclave a pris un sérieux coup de plomb dans l’aile et n’est pas certain d’aller à son terme, faute de combattants !
C’est sûr, face à cette impasse, il est urgent de se « réarmer » sur le toujours épineux et très impopulaire dossier des retraites !
Thierry BRET