Décidément, rien ne sera donc épargné aux zones rurales de notre beau pays ! Surtout celles qui se situent dans la fameuse bande de la « Diagonale du Vide », la bien-nommée. Evidemment, la région Bourgogne Franche-Comté, à l’instar de la Champagne ou d’une large frange de la région Centre, en fait partie. Voilà que la puissance étatique, peu avare en coupes sombres en tout genre, surtout quand les économies doivent se réaliser en province dans les campagnes les plus reculées du territoire plutôt que dans les ministères parisiens, a décidé au nom du respect impérieux de la sacro-sainte ligne budgétaire 2025 de se défausser en matière de réhabilitation financière en ce qui concerne les réaménagements des « petites » lignes ferroviaires sur les Régions. Celles-ci ayant déjà les plus grandes difficultés à subvenir à leurs besoins, vu leur enveloppe de fonctionnement et d’investissements qui a pris un très sérieux coup dans l’aile, devant réduire leurs aides de manière très drastique. Et ce, depuis deux années, déjà…
Alors que les zones rurales souffrent d’un manque d’à peu près tout sur le plan fonctionnel (désertification médicale, absence d’infrastructures routières ou autoroutières digne de ces appellations, déclin des services publics, défaut de centres de formation et d’enseignement de niveau supérieur…) quand ce ne sont pas les zones blanches de la téléphonie ou du numérique qui se rappellent encore à notre bon souvenir, voilà que le dossier des transports collectifs remonte à la surface en ce début d’année.
Fichtre ! De quoi faire dérailler une bonne fois pour tout le train de l’attractivité rurale dont on nous vante pourtant les bienfaits chaque jour auprès des instances institutionnelles et politiques de ces secteurs géographiques mais qui dans les faits ont bien du mal à prendre racine. Il suffit pour s’en apercevoir de tâter le pouls des activités économiques enregistrées sur ces zones champêtres pour constater le fossé qui existe bel et bien entre la réalité du terrain et le verbiage habituel des promesses, qui comme de bien entendu ne sont pas tenues…
L’indispensable moyen de locomotion à vocation sociétale
Alors, de quoi s’agit-il précisément dans ce nouveau dossier qui atteste bien que la France fonctionne réellement à deux vitesses, pour celles et ceux qui en douteraient encore : celles des villes, et celles des champs ! Cela aurait pu inspirer le fabuliste Jean de La FONTAINE s’il revenait à notre époque !
L’exemple du moment, c’est la menace qui plane sur la pérennité des « petites » lignes ferroviaires. Trop coûteuses et peu rentables. Nonobstant, un indispensable moyen de locomotion pour relier les agglomérations moyennes de nos campagnes aux grandes cités de la métropole. A l’exemple de ces lignes empruntées par des TER entre Avallon, Corbigny, Clamecy, Auxerre…
Les usagères et les usagers utilisent ces trains pour se rendre à leur travail, parfois jusqu’à Paris puisque l’une des dessertes recherchées est précisément la capitale de l’Hexagone. Mais, aussi pour bénéficier de salvatrices et nécessaires opportunités de services sanitaires que les campagnes ne permettent plus : aller se soigner chez un médecin ou un spécialiste – il y a belle lurette que le département de l’Yonne pour mémoire ne dispose plus de rhumatologue ou de dermatologue sur son territoire alors que le vieillissement de la population est en progression ascendante ! -, ou à des fins d’agrément personnel, tant pour la vie culturelle que proposent les grandes villes que les voyages via le relais aéroportuaire de Paris.
L’Etat renvoie la balle sur les Régions : l’impossible équation
Oui, mais voilà. Entretenir ces infrastructures coûte un bras ! Surtout quand il s’agit de rénover les lignes, voire de les dédoubler si besoin. Et l’Etat doit impérativement réaliser des économies pour tenter d’inverser la tendance abyssale de la dette publique, estimée à date à plus de 3 000 milliards d’euros. Sic ! Et encore, on peut se féliciter de disposer dorénavant d’un budget en 2025 pour celles et ceux qui feraient la fine bouche !
Pour remédier à ces nombreux entretiens de lignes ferroviaires qui entrent dans le domaine de compétences des Régions, il faudrait grosso modo que celle de la Bourgogne Franche-Comté dispose de 400 millions d’euros pour mieux les injecter ensuite dans la réalisation de différents travaux sur l’ensemble de son territoire et ses huit départements. Bien sûr, l’institution ne les possède pas aujourd’hui, devant faire face à une très importante réduction de ses enveloppes financières. Un peu plus d’1,5 million d’euros serait impératif pour envisager l’amélioration de la seule ligne ferroviaire entre Corbigny et Clamecy, d’après les estimations des porte-paroles du collectif LAD, soit « Lignes à Défendre » en Bourgogne Nord, à l’origine d’un grand rassemblement populaire, ce samedi 08 février en gare de Clamecy, où étaient présents élus, institutionnels, syndicalistes, citoyens…
Objectif : faire pression sur l’Etat pour que celui-ci revoit sa « copy stratégie » afin de ne pas plomber un peu plus l’attractivité déjà très relative des zones rurales. Car, demain, peut-être, faute de réhabilitation de ces structures, plus aucun train ne pourrait circuler si l’on n’y prend garde. Notamment dans cette zone de la « Diagonale du Vide ». Une seule manifestation n’y suffira pas, bien sûr !
Engagé dans la défense et l'amélioration des liaisons ferroviaires régionales, et plus particulièrement celles des lignes TER entre les localités d’Avallon/Corbigny/Clamecy/Auxerre/Paris, le collectif « LAD Bourgogne Nord » multiplie ainsi les initiatives en tout genre entre pétitions, manifestations, motions, rencontres…La prochaine opération traduisant leur mécontentement est d’ailleurs programmée le samedi 15 février en gare d’Avallon.
Le bras de fer entre les usagères et les usagers de ces nécessaires TER, soutenus par les élus du territoire, et les services étatiques ne fait que commencer. Il en va de la liberté de se mouvoir dans nos régions et notre pays, il en va aussi de remettre les villes et les zones rurales sur le même pied d’égalité. Au nom de l’attractivité territoriale qui pourrait très vite dérailler pour les campagnes de l’Hexagone…
Thierry BRET