Plus d’une centaine de rassemblements contre le racisme étaient organisés ce samedi dans toute la France, au lendemain de la Journée internationale pour l’élimination de la discrimination raciale, inscrite par l’ONU au calendrier, le 21 mars. Partis de la place de l’Arquebuse, ils étaient près de 250 personnes à marcher à Auxerre, pour dire non à toute forme de différenciation, que ce soit en fonction de sa couleur, de sa religion ou de ses idées. Une mobilisation qui affichait en filigrane un refus des thèses défendues par la droite extrême…
AUXERRE : Est-il chose plus multiple et plus répandue à travers le monde que le racisme ? A chacun sa couleur, à chacun son credo : anti-noir, anti-arabe, anti-jaune, anti-blanc, anti-jeune, anti-vieux… Autant d’idéologies prônant la supériorité d’une race sur une autre, autant de thèses refusant d’accepter la « différence » et de juger une personne sur ce qu’il est et non d’où il vient. « No pasaran ! ». Sur un panneau, écrit à la main, ce cri de ralliement venu de l’autre côté des Pyrénées, quand l’Espagne s’enfonçait dans une longue nuit fasciste. Message d’espoir aussi, pour nombre de personnes présentes ce samedi après-midi à Auxerre, avec pour certains le sentiment qu’il est peut-être déjà trop tard…
Rassemblés dans leurs différentes composantes, les forces de gauche sont bien sur présentes et affichent la couleur : du rose, du rouge, du violet (mais pas de vert…), entourés entre autres, de syndicalistes, de militants du MRAP, du réseau de Soutien aux migrants 89, de la Ligue des Droits de l’Homme, de la Libre Pensée, de la Cimade, du collectif Vivons ensemble… Un chiffre brandi à bout de bras : « + 11 % d’actes racistes en 2024 », sans que l’on sache si les 1 570 actes antisémites recensés la même année, font partie du sinistre décompte.
« Une vigilance absolue afin de ne pas alimenter les attaques… »
« Les racistes sont arrivés au pouvoir » : sur un autre panneau, cette allusion pas du tout voilée, aux propos du député Daniel GRENON visant les Maghrébins et pour lesquels il est poursuivi en justice. « Ils étaient vingt et cent, ils étaient des milliers… ». La sono fait vibrer les mots de Jean FERRAT et les notes s’envolent, dans « Nuit et Brouillard », bien loin de la polémique née de la caricature de Cyril HANOUNA, valant à LFI des accusations d’antisémitisme. Pour autant, cette militante d’une association luttant contre le racisme met en garde : « nous devons avoir une vigilance absolue, que ce soit sur les commentaires et les productions des uns et des autres, afin de ne pas alimenter les attaques… ».
Commémorer côté du boulevard, est installé le campement des « reconstitueurs » napoléoniens, invités par la ville pour célébrer le 210ème anniversaire de sa rencontre historique avec le maréchal NEY, mais un monde les sépare et les commentaires vont bon train : « aujourd’hui, mettre ainsi Napoléon en avant, lui qui a rétabli l’esclavage, c’est une aberration ! C’était notre facho de l’époque… ». Son voisin temporise : « peut-être pas un facho, mais au moins un dictateur ! ».
Un appel au vivre ensemble et à la sérénité
Zoubida est militante au MRAP et avec ses mots sortis du cœur a donné le ton de la marche, à quelques minutes du départ : « la France, ce n’est pas celle de l’exclusion, c’est celle de l’égalité, de la fraternité, de la liberté, la France est belle avec ses mélanges… ». Rappelant un grand-père combattant ayant perdu une jambe pour ce pays et un père qui a contribué à le construire : « on a appris à faire le bœuf bourguignon, on a appris la blanquette, on a appris la culture, l’histoire, ne nous enlevez pas tout ça ! ».
Un appel à « vivre ensemble » et le refus de ne pas être considéré comme française à part entière : « l’arc-en-ciel a beaucoup de couleurs, pourquoi serions-nous différents ? Aujourd’hui, une grande partie des médecins à Auxerre sont arabes ou africains, même chose dans la police, dans la gendarmerie, nous aussi cherchons l’ordre, la sérénité… ».
Il avait coutume de dire que lorsqu’il entendait quelqu’un traité de « sale juif, de sale nègre, de sale arabe », il revendiquait pour lui d’être simplement traité de « salaud » s’il le méritait, rajoutant que « le jour où les juifs se verront dûment et légalement conférer le droit imprescriptible d’être des salauds comme les autres, comme les autres salauds bien entendu, l’antisémitisme sera virtuellement vaincu ».
Une citation que l’on peut aujourd’hui encore, décliner bien sûr à tous les temps et dans toutes les couleurs ! Il s’appelait de son vrai patronyme Isaac ANDRÉ, plus connu sous le nom de Pierre DAC…
Dominique BERNERD