A deux semaines du premier tour des législatives, la gauche dans ses différentes composantes s’est mobilisée pour dire non au Rassemblement National. Une initiative à l’appel de l’intersyndicale, d’associations et de forces de gauche, qui a réuni notamment un demi-millier de personnes à Auxerre. L’occasion pour la candidate du Nouveau Front Populaire dans la première circonscription, Florence LOURY – elle s’adressait pour la première fois en public sous les couleurs de cette coalition - de lancer un appel à la mobilisation pour les scrutins des 30 juin et 7 juillet prochains.
AUXERRE: Ce n’est pas tous les jours que Cadet-Roussel, du haut de sa statue, voit plusieurs centaines de personnes patienter à ses pieds une heure durant ! Faute d’autorisation de la préfecture pour défiler dans les rues d’Auxerre, les opposants à Jordan BARDELLA ont dû se contenter d’un rassemblement statique place Charles-Surugue, forts d’un accord accouché au forceps après d’âpres négociations, pour se présenter unis devant les électeurs. Même si l’accord semble fragile toutefois, à en juger par les réactions de certaines personnes présentes, suite à la décision de la direction de LFI de retirer l’investiture du mouvement à plusieurs députés sortants, parmi lesquels Raquel GARRIDO, Alexis CORBIERE ou Danièle SIMONNET. Tous coupables du crime de lèse-majesté d’avoir osé critiquer en son temps le « lider maximo » Jean-Luc MELENCHON… Une purge qui n’est pas sans rappeler les heures sombres du maoïsme ou du stalinisme !
Les couleurs de l’arc-en-ciel politique des forces de gauche
Vert écolo, violet LFI, orange CFDT, rouge CGT et PCF, bleu UNSA, rose PS… : les cieux auxerrois se sont teinté des couleurs arc-en-ciel alors que la perspective d’une entrée du Rassemblement National à Matignon n’a jamais été autant d’actualité. La margelle de la fontaine Cadet- Roussel a fait office de tribune et les interventions se sont enchaînées pour appeler à la mobilisation et au sursaut républicain : « il nous faut redonner ses lettres de noblesse à notre chère République… ». Chacun était conscient d’écrire une page d’histoire de notre pays, « un électeur sur deux dans notre département vote extrême droite ! Nous sommes à un point de bascule, tout est possible... ».
En toile de fond, un slogan né des années 80, signé du groupe BERURIER NOIR : « La jeunesse emmerde le Front National… ». Une époque où, voir le parti de Jean-Marie LE PEN enregistrer 11 % de suffrages aux élections européennes, suffisait à faire office d’électrochoc dans l’opinion.
« Ne pas essayer le Front national »…
Cheveux blancs oblige, Claude a « revisité » à sa façon le titre culte de l’ancien groupe phare de la scène punk française. Sur sa pancarte, une pièce de tissu rouge héritée de son grand-père et de la guerre de 1914, attire les regards : « c’est le pantalon rouge garance qu’il portait alors. Il a toujours lutté toute sa vie pour l’unité et je me place dans sa continuité… ».
Les mots de cet ancien prof d’histoire sont sans appel : « il ne faut pas « essayer » le Front National, c’est un chemin sans retour et il faut lutter pour l’unité de la gauche, à tout prix ! ».
Jusqu’à envisager un nouveau front républicain au second tour ? Pas question répond Denis, échaudé par le souvenir du second tour de la présidentielle de 2002, « on a vu ce que cela a donné après, avec CHIRAC ! A mon avis, le mécanisme du front républicain a du plomb dans l’aile aujourd’hui… ».
Est-ce que l’unité va tenir dans le temps ?
Encarté au Parti Communiste, Patrick est d’un avis contraire : « j’ai toujours été clair et ferai au second tour si nécessaire, comme j’ai toujours fait jusque-là, même si ça fait mal… ».
Les slogans et les chants s’amplifient, sous le regard parfois courroucé de certains passants, à l’image de ce couple auxerrois venu effectuer quelques achats en centre-ville : « ça suffit maintenant ! Le peuple a parlé, il faut le respecter… ».
Un peu plus loin, cet habitué des manifestations et de la lutte sociale, s’interroge : « l’unité va-t-elle tenir ? CORBIERE, GARRIDO…, ça la fout mal quand même ! Je crois qu’ils ne se rendent pas compte… ».
Dominique BERNERD